Galibot Création
Galibot ce n'est pas juste un spectacle. C'est le récit d'un homme blessé par la mine, blessé par la vie et la mort, blessé dans sa dignité d'être humain. La tournée aura l'honneur de prendre naissance dans un lieu unique, reconnu patrimoine de l'Unesco : Le Bois du Cazier. Un endroit de Mémoire où l'on pourra suivre Jean au plus proche de ce qu'il a aimé et qui l'a détruit. « Je m'appelle Jean. Je suis mineur. Je fore, je dynamite, j'extrais et je charge. Forage, dynamitage, extraction, chargement. Dix heures par jour. Notre vie, on la passe sous terre à manger du charbon, de la roche, à attendre le chariot. A encrasser nos poumons. Puis, ça craque d'un coup. Je sais pas comment c'est arrivé. Mais y a eu un éboulement, puis de la fumée. Je vois plus rien. Je me souviens plus comment je réagis. Me souviens des roches qui tombent sur mes jambes, ça oui m'en souviens. Me souviens que j'arrive plus à bouger... Je me demande ce que devient mon fils... » Mineur rescapé d’un éboulement, Jean a perdu l’usage de ses jambes. Et son fils. Sa vie.... Comment avez-vous découvert ce texte? Un beau jour, David Delaloy me demande de lire un monologue qu’il a écrit, juste pour que je lui donne mon avis de comédien, de metteur-en-scène. Dans ma tête, cela ne fait ni une ni deux : « Jean », son personnage, ce sera moi ! Ta pièce, je veux la jouer. Elle est riche, elle est belle : le mot "Galibot" n'est pas un hasard. Non, Jean n'en est pas un. Ces enfants de 8 à 12 ans qui creusaient au fond des mines dans les endroits inaccessibles n'existent plus depuis longtemps. Mais aujourd'hui encore, dans d'autres mines, des enfants meurent pour que nous puissions jouir de nos téléphones portables. "Galibot", ce n’est pas que la souffrance d’un travailleur détruit par un accident de la mine, comme notre pays en a connu tant à l époque de sa richesse mais aussi de son désespoir. C'est surtout la souffrance de cet homme face aux regards des « autres », mais aussi l’espoir d'une vie malgré ce handicap, et la perte de son enfant. Comment, évidemment, ne pas penser au « Bois du Cazier » ? Cet événement, où grand nombre d’immigrants et de belges ont perdu la vie restera malheureusement à jamais inscrit dans notre patrimoine. Cependant, le propos de l’œuvre concerne tous les infirmes. Pour Jean, ce n’est pas la perte de ses jambes qui est au centre de ses préoccupations, mais l’oubli du monde politique, de la sphère industrielle, des journalistes... Son handicap fait de lui un être rejeté par les « autres ». Il y a peu j'ai visité? uschwitz et Birkenau. Cela ne semble avoir qu'un rapport lointain avec la pièce, mais l'émotion que j'y ai ressentie m'a fait prendre conscience qu'il fallait montrer ce monologue: il parle d'immigration, de handicap, et de la douleur d'une certaine humanité, malheureusement toujours présente aujourd'hui. L’envie et la nécessité de m’associer à David a été fulgurante. L’accueil du Conservateur et de la Directrice du Bois du Cazier a été inouï et châleureux. A la suite de la lecture d'un extrait, après un silence lourd et éloquent, leurs seules paroles ont été : « C’est très fort ». Pour vous, qui est Jean ? Il est mineur, mais il aurait pu être travailleur dans la construction du métro de Bruxelles, il aurait pu être wallon, italien, polonais, ou maghrébin, ou appartenir à l’une de ces nombreuses nationalités qui sont venues travailler et se chercher une vie chez nous, il aurait pu être n’importe lequel de ces ouvriers qui ont sacrifié, cette vie, pour le bien ou le confort de chacun d’entre nous sans que jamais nous n’ayons conscience de ce qu’ils ont pu être. Ce que le personnage partage avec nous, ce n’est pas seulement son accident, la perte de ses jambes, la perte de son fils, le départ de sa femme… C’est plus encore la souffrance que lui inflige le regard des autres. Ce que Jean ne supporte plus, c’est de ne pas être vu comme un être humain. Quel est le point principal de ce récit? Tout le monde peut s'y reconnaître. Jean est le frère de toutes les personnes porteuses d'un handicap, quelle que soit leur infirmité, et quelle qu'en soit la cause. L'histoire traverse les générations et fait encore écho de nos jours. Je pense que Jean dit une vérité qui doit être sue, entendue : les conditions de travail, les pertes humaines pour des centaines de famille. Endeuillé de son fils, il dépeint avec émotion les facettes de son passé et celui de ses compagnons et critique sans fioritures cette société en manque d'amour. A qui sera destiné le spectacle? A tous. Notre souhait est que Le Bois du Cazier ne soit que le point de départ d'une série de représentations qui feront raisonner cette histoire dans tous les lieux possibles. Notre projet est de pouvoir tourner la pièce dans d'autres lieux historiques, musées-mines bien entendu, mais aussi tout autre endroit chargé d'histoire, en France, Belgique, Luxembourg, dans toutes les régions qui ont été le témoin de l'immigration ou de ce lourd passé minier. Mais notre objectif n'est pas de nous limiter aux lieux historiques, mais aussi de la présenter dans différentes salles de spectacles, quelle qu'en soit la localisation, ainsi que dans les écoles, où elle pourrait être accompagnée d'animations ou de débats "bord de scène" ou autres. Dans ce but, la pièce sera disponible sous différentes versions : une version "théâtre", telle qu'elle sera présentée au Bois du Cazier, mais également, des versions plus intimistes, en proximité directe avec le public, adaptable ainsi à n'importe quel lieu, théâtral ou non, qui voudrait l'accueillir. L'équipe L'auteur: David Delaloy Après être sorti du Conservatoire Royal de Mons en 2009, et un Erasmus d’un an au Conservatoire d’art dramatique de Québec, David Delaloy intègre pendant quinze mois l'École du Cirque de Pékin. À son retour, il reprend le chemin des planches à Bruxelles, avant de partir pour Paris. Parallèlement, David fait des apparitions dans la publicité et au cinéma. Ce qui lui permet de donner la réplique à Marianne Basler et Josiane Balasko. « Galibot » est sa première oeuvre littéraire. Le comédien : Daniel Nicodème Formé au Conservatoire Royal de Bruxelles et à la California State University à Long Beach, pendant de nombreuses années, il enchaînera les rôles tant sur différentes scènes bruxelloises que lors de tournées internationales. Retiré des planches pendant près de dix ans, il a été la voix française de Kenneth Brannagh, Liam Neeson, William Hurt, Ryan O’Neil, Christopher Walken, et de bien d’autres. Depuis, remonté sur scène, il est aussi enseignant en art dramatique, directeur d’une compagnie théâtrale pour enfants, formateur en doublage, coach vocal, narrateur sur des films documentaires, directeur artistique en doublage, lecteur de livres audio pour lesquels il est détenteur de plusieurs prix. « Galibot » est son premier « seul en scène » en tant que comédien. Le directeur d'acteur : Benoît Van Dorslaer Boulimique du genre, Benoît Van Dorslaer écume les planches de manière polymorphe. Père de famille, comédien, jouteur, doubleur, metteur en scène, professeur d’art dramatique… Benoît jongle avec ses multiples casquettes. Depuis 2018, animé de la même passion, il touche également au cinéma. Baigné dans l’enfance dans le rythme de l’Afrique noire, il en a gardé un goût immodéré pour la transmission orale.