Pourquoi soutenir Some Girls, notre projet de court métrage ? Et tout d’abord, pourquoi tourner un court métrage en 2010 ?

C’est vrai qu’on est en droit de se poser la question : Quasiment aucune chaîne de télévision n’en diffuse, les festivals qui s’y consacrent n’ont pas (à part peut-être celui de Clermont-Ferrand) la notoriété des festivals de longs métrages, et quand ces derniers proposent des courts, c’est à peine si l’information est relayée en dehors des médias spécialisés. (Saviez-vous que Jane Campion, Jim Jarmush ou Xavier Giannoli avaient reçu la Palme d’or du meilleur court métrage ?) Il y a donc de quoi être perplexe quant à l’utilité d’un tel format.

Et pourtant, pratiquement tous les réalisateurs “modernes” ont commencé par tourner un court métrage (lorsque ce n’est pas le cas, c’est en général parce qu’ils étaient déjà acteurs ou scénaristes avant de se lancer dans la réalisation). Nolan (Inception), Beauvois (Des Hommes et des dieux), Blier (Le Bruit des glaçons), Aja (Piranha 3-D), Genestal (Krach), Vinterberg (Submarino), Lanoo (Vampires), Noyce (Salt), pour ne prendre que quelques-uns de ceux qui font l’actualité cinématographique de cette fin d’été, ont tous réalisé un ou plusieurs courts métrages avant de s’attaquer à un long.

Alors quoi ? Ce genre sert-il uniquement aux réalisateurs à faire leurs armes et essuyer les plâtres ? C’est pas faux, mais ça va tout de même un peu au-delà de ça.

Comme n’importe quel artiste, un réalisateur est quelqu’un qui a des choses à montrer. S’il était peintre, dessinateur, sculpteur ou photographe, il se mettrait tout seul dans un coin et serait en mesure, quelques heures ou quelques jours plus tard, de nous présenter une première œuvre — et à nous de juger s’il y a matière ou non à s’extasier, ou tout du moins à espérer…

En revanche, le premier travail d’un réalisateur est de convaincre une équipe de comédiens et de techniciens de le suivre bénévolement sur son projet de court métrage et de tout faire pour que son film ressemble à ce qu’il a en tête. Une fois formée, il doit ensuite mettre à la disposition de cette équipe un lieu et du matériel afin que chacun puisse travailler dans les meilleures conditions. Et, bien évidemment, il va sans dire qu’il s’engage à ce que ces personnes soient accueillies convenablement.

Avant même qu’un seul plan soit tourné, le réalisateur a donc à résoudre une multitude de détails techniques, et pour la plupart extra-artistiques. Si tout se passe au mieux lors des préparatifs, alors seulement pourra-t-il se consacrer à l’artistique et voir enfin se matérialiser sous ses yeux les images qu’il avait jusque-là dans la tête. Enfin, après ce long marathon, sera-t-il en mesure de démontrer qu’il avait bien toutes les raisons de s’acharner, qu’il avait effectivement quelque chose à dire, à montrer, qu’il était en mesure de nous faire rêver et que son rôle de réalisateur n’était pas usurpé.

En cela, le tournage en lui-même, si tant est qu’il se déroule dans de bonnes conditions, en devient presque une récompense. — Bon, il ne faut pas non plus se leurrer : un tournage de court métrage, même préparé au mieux, se fait toujours un peu à l’arrache et reste un grand moment de rock’n’roll. —

Voilà donc à quoi sert le court métrage aujourd’hui : à découvrir de nouveaux réalisateurs, à assister à leurs premiers pas, à voir se mettre en place leur mode d’expression et ce qu’on appellera plus tard leur patte, leur touche personnelle — et accessoirement, à mettre leur endurance et leur détermination à l’épreuve.

En participant avec nous à l’élaboration de Some Girls, le premier court métrage d’Ãnanda Safo, vous rendrez possible le travail de toute une équipe de bénévoles, comédiens et techniciens professionnels, déjà très motivés par le projet. Vous permettrez à la réalisatrice de ce film d’une vingtaine de minutes de concrétiser les plans, les lumières, les mouvements de caméra, le jeu des comédiens… qu’elle a en tête. Et, n’en doutons pas, vous aurez le plaisir de découvrir, ainsi que le public (amateur et professionnel) des festivals, une œuvre originale et prometteuse, à laquelle vous aurez associé votre nom.

Martin du Peuty (co-scénariste et — par la force des choses — co-producteur)