Bonjour à tous,

De retour à Paris, je viens de compléter le dernier mail avec les photos qui n'avaient pas réussi à se charger. Suite à ce récit, vous recevrez un autre mail que je viens de rédiger qui raconte la fin du voyage et l'aboutissement du projet.

>>>>>> ceci date donc d'il y a 2 semaines >>>>

Voici quelques nouvelles du Panama !

J’ai finalement décidé de retourner dans le village de Monagrio, à côté de Chitré, sur la côte Pacifique, afin de commencer mes recherches.

Il a été difficile de faire ce choix, car j’avais très envie de retourner dans les montagnes et commencer directement à travailler les fibres avec Ronaldo, mais j’étais trop tentée de découvrir de nouveaux ateliers. D’un point de vue logistique c’était plus simple aussi…

Ce fut une expérience incroyable. Une sorte de workshop géant… Dans ce même village, j’avais accès à un atelier de cuir, de céramique, de papier-maché, fabrication de filets de pêche…

J’ai eu la chance d’être prise en charge par un taxi (qui a finalement joué un rôle beaucoup plus grand qu’un simple taxi), il s’agit de Nengue :

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Il faisait le lien entre tous les artisans (qui pour la plus part étaient des amis à lui), il me guidait dans les boutiques que je recherchais, me dégotait de nouveaux ateliers, savait où trouver le matériel dont j’avais besoin... Une aide précieuse et un super intermédiaire. Au début il était surpris par mes demandes étranges (aller chercher du sable noir à la plage à 7h du matin, trouver des carcasses de ventilateurs..), mais il s’est vite pris au jeu, et expliquait le projet à tout le monde !

Quand il me déposait chez un artisan il disait toujours « Ya, llego la Luna » (Ca y est, la lune est là), car pour eux je suis blanche comme la lune.

J’ai finalement passé pas mal de temps dans un atelier de céramique, où on travaille uniquement l’argile (barro). J’ai rencontré German qui m’a tout de suite acceptée : « J’ai deux tours dans l’atelier, l’un des deux est libre, vas-y fais toi la main ! » Quel joie, les mains dans la terre :) J’ai passé une semaine à ses côtés.

J’ai participé à la fabrication de l’argile, et fais une série de tests en mélangeant la terre avec d’autres éléments (pigments, pierres, rebus d’ argile, achiote, sable noir) pour observer les réactions. German était très patient… J’avais pas mal d’espoir dans mes tests au sable noir (ici le sable est noir sur la côte pacifique car il contient beaucoup de fer, on dit qu’on peut le récolter avec un aimant), mais le rendu après cuisson est toujours différents et l’effet est finalement resté assez discret.

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German

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L'atelier de céramique avec les tas d'argile déposés devant l'atelier avant sa préparation

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Le four

J’ai développé une série de formes avec German. J’avais pour idée d’apporter ces volumes dans les autres ateliers pour voir comment les artisans allaient poursuivre ces volumes avec leurs propres techniques, et observer les différents types de liens.

Pour développer les formes de bases en argile, j’ai d’abord dessiné des intentions en m’inspirant de ce qui m’a marqué visuellement ici : les toits des cabanes, les formes des fours des ateliers de céramique, les tas de pierres au bord des routes, les flotteurs des pêcheurs.

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(la première série de formes avant cuisson)

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(test colorant)

German ayant 30 ans de pratique du tour derrière lui, et moi 2 jours (ahah), je lui ai demandé de fabriquer mes pièces. J’ai mis en place un process particulier : il tournait et je dessinais en même temps pour essayer de capter les formes intermédiaires qui apparaissaient avant d’obtenir la pièce finale.

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C’était très intéressant, car mes volumes se modifiaient sous la pression de ses mains. Je devais forcement dessiner rapidement ce qui rendait mes lignes droites, pour schématiser.

Je lui ai donc demandé d’accentuer les lignes et les angles, il n’avait pas l’habitude. Tout est courbe ici, c’était donc plus difficile pour lui, mais il s’est prêté au jeu et a commencé à apprécier les pièces qui sortaient.

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(la deuxième série de formes avant cuisson)

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(test de mélange argile+achiote)

Suite à cela, j’ai passé 2 jours dans l’atelier de Jose, qui fabrique (avec toute sa famille) des masques de diablito en papier maché. Endroit hallucinant. Ces masques sont utilisés lors de danses pour des événements particuliers. L’atelier regorge de masques de diables, d’animaux, de monstres, d’extra-terrestres…

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En premier il modèle à la main la figure en argile, puis après séchage sa femme la recouvre de vaseline puis de 3 couches de papier-maché. Ensuite, une autre personne lui passe une couche de peinture blanche, puis le peintre passe un vernis et décore le masque avec des pistolet à pression. J’ai utilisé la même technique mais en prenant pour base les pièces faites avec German.

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Jose connait une quantité de techniques pour faire des textures différentes sur les masques, je lui ai demandé qu’il m’en apprenne quelques unes…

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C’est dans cet atelier que j’ai découvert que beaucoup d’artisans utilisent les carcasses de ventilateur comme récipients pour leurs pièces… Je me suis mis en tête de trouver la mienne et utiliser la structure comme base de tissage.

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J’ai fini mon séjour en retournant dans les ateliers de cuirs et de filets de pêche, mais cette fois-ci avec mes volumes en céramique.

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Ce séjour était très riche, d’un point de vue créatif mais surtout d’un point de vue humain : l’intérêt des artisans pour mon projet, leur patience, la manière dont j’ai été accueillie, intégrée et pris en charge m’a beaucoup touchée. J’ai pris beaucoup de plaisir à échanger avec eux, ils m’apportaient leur savoir et je les sensibilisais à mes méthodes de création, c’était impressionnant de voir toutes les idées qui leur venaient en tête regardant les choses d’un autre œil, ou suite à une expérience que l’on faisait. Je crois que eux aussi ont apprécié…

Aujourd’hui, je pars pour une autre ville qui s’appelle Pénonomé à la recherche du dernier atelier : le tissage de fibres (palma, bejuco). C’était ce que je cherchais au début, j’avais espoir de trouver cette technique dans le village mais tout le monde me disait « Penonome, Penonome ». Je vais donc à Penonome !!!! Desfois, il faut du temps pour trouver les bons contacts…

Je pars avec ma caisse de céramique sous le bras, ma carcasse de ventilateur, mes cordes de pêches et mes flotteurs… (oui, je suis légèrement chargée !!!)

Je vous donne rendez-vous dans 2 semaines pour mon dernier récit !!

Collaboration artisan-designer au Panama