Moi, le quota où l'itinéraire d'une salariée en situation de handicap invisible

Handicap et entreprise : brisons l'omerta. L'insertion c'est bien, l'inclusion c'est mieux !

Project visual Moi, le quota où l'itinéraire d'une salariée en situation de handicap invisible
Successful
121
Contributions
12/12/2021
End date
€4,230
Out of €3,000
141 %

The publications

Ca y est, le livre est parti en impression ! Il ne m'appartient plus ! Je vous garantie que je n'ai jamais été autant stressée en appuyant sur le bouton "valider". Oui, je vous jure, c'est pire pour moi d'éditer un livre que de monter sur scène, tout ce que je vais dire sera gravé dans le marbre (oui, pénurie de papier oblige, j'ai dû éditer sur du marbre... outch les frais de port). Normalement, la livraison aura lieu le 22 janvier, mais nous ne sommes jamais à l'abri d'un petit retard, d'une grève, d'intempéries... que sais-je. Alors pour vous faire patienter, je vous dévoile la couverture et le dos de couverture du livre en avant-première ! Au fait, bonne année à toutes et tous !
J - 4 ! Un incommensurable merci à tous les contributeurs.trices, vous êtes plus d'une centaine à avoir pris le temps de donner, à vous intéresser au projet, à le partager, à m'envoyer des messages qui me vont droit au coeur... et vous êtes plus de 80 à avoir pré-commander le livre ! Wouha ! La cagnotte a atteint ce jour 3975 euros. Je peux vous dire qu'avec un tel montant ce n'est pas 500 ni 1000 livres que je vais pouvoir imprimer mais 2000 ! Avec peut être le plaisir de le voir trôner à la FNAC, why not ? 4 jours, il te reste 4 jours - pour contribuer - pour transférer le lien de la cagnotte à tes collègues, ami.es, voisins, libraires, journalistes... : https://www.kisskissbankbank.com/fr/projects/livre-temoignage-moi-le-quota - pré-commander le livre car pour un don de 30 euros, tu as le livre qui arrivera chez toi en janvier Merci encore de ton aide, à toi, qui lit ce message. "Tout seul on va plus vite, ensemble on va plus loin !"
Pour fêter le 100ème contributeur :-) Le premier jour du reste de ma vie… de quota ! Paris, Décembre 2010. Installez-vous ici, regardez l’objectif, baissez un peu la tête pour ne pas avoir le reflet de vos lunettes. Voilà comme ça. Attention, regardez ma main, 3,2,1 souriez. C’est bon pour moi. Attendez ici un instant je reviens. Voilà votre badge, bienvenue chez Rézo ! Ça y est, j’intègre enfin une grande entreprise publique. D’accord c’est un CDD mais ils m’ont promis que cela pouvait certainement déboucher sur un CDI. Mon premier job de Chargée de communication reconnue en tant que RQTH, Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé. Trois agences spécialisées dans le recrutement de Travailleurs handicapés m’ont contactée pour ce poste. A 28 ans, j’ai le sentiment qu’enfin je vais me stabiliser professionnellement, que je suis à un grand tournant de ma vie. Mes parents vont être soulagés de me savoir en sécurité financière, protégée des préjugés liés à mon physique et à mon handicap, bien qu’invisible. Je fais partie des 1 500 salariés de cette boîte et de ses 80 % de cadres. Autant dire que ça met un peu la pression. Mon poste est localisé en région, à la Direction Île-de-France, les locaux sont à Paris. Paris que j’ai quitté en 2006, après avoir obtenu mon diplôme en publicité. Le bâtiment est magnifique. Hyper moderne, tout en verre, le sol est en marbre, un hall immense avec trois grands portiques pour badger, quatre ascenseurs… tel un hôtel de luxe, la grande classe. J’appelle les ascenseurs. J’ai mal au ventre, le souffle court, une foultitude de questions défile dans ma tête… Vais-je être à la hauteur ? Et si le boulot ne me plaît pas ? Ce serait dommage, c’est quand même une belle boîte… c’est secure*… Quelles vont être mes missions concrètement ? Et si je ne comprends rien à l’activité ? L’ascenseur arrive, je rentre. 1,2,3,4. Ding, vous êtes au quatrième étage. L’ascenseur parle, wouw ! je sors et c’est Gontrand qui m’accueille, celui qui m’a recruté, le responsable de la communication, mon chef. Lors de mon entretien avec lui, il me regarde droit dans les yeux, en se balançant sur sa chaise les jambes croisées et en faisant tourner son stylo entre son pouce et son index. Je suis impressionnée par sa connaissance de l’entreprise, des chiffres… et de sa décontraction malgré son poste. Néophyte en grande entreprise, j’ai rapidement compris ensuite que c’était pour mettre de la poudre aux yeux. Quand tu bosses dans la com’, savoir ce qu’il savait, c’était la base des éléments de langage. Il parle beaucoup, surtout de la boîte et de lui. Il a été conquis par mon CV. Il cherchait absolument une personne en situation de handicap pour ce poste et les candidatures ne couraient pas les rues… Vu le peu d’accessibilité à la scolarité et à l’université en France pour les personnes en situation de handicap, nous n’étions que deux candidats sur ce poste de cadre qui nécessitait minimum un Bac + 3. Le quota de recrutement de 6 % de RQTH est difficile à atteindre dans cette entreprise qui compte 80 % de cadres. Ma prédécesseuse n’a pas tenu la période d’essai. Il *secure : en sécurité Me questionne pas mal sur comment je réagirais face à telle ou telle situation. Une question m’interpelle particulièrement : Comment réagiriez-vous si après un coup de fil avec quelqu’un, votre collègue vous fait une remarque sur ce que vous avez dit ? Je réponds quelque chose du style : tous les conseils sont toujours bons à prendre mais tout dépend comment mon collègue me présente les choses. À la sortie de notre entrevue, je suis plutôt contente, j’ai dit ce que j’avais à dire, sans trahir mes convictions et en ayant fait part correctement de ma motivation. J’y ai évoqué mon handicap en indiquant que je serai absente une journée tous les trois mois mais pas plus, à l’époque, ma fatigabilité n’était pas encore accrue… enfin, je comprendrais plus tard que je ne voulais pas la voir. Est arrivée ensuite l’étape DRH, avec la responsable du recrutement, Monique, accompagnée de Gontrand, ils avaient des dernières questions à me poser. Monique est une femme imposante. Elle est forte, très grande, a le verbe haut et ne peut pas s’empêcher de postillonner en parlant. Un ego à la mesure de son tour de taille : si tu as du travail, que tu as cette paie, c’est grâce à elle, elle se bat bec et ongles pour toi, soi-disant. Elle ne suit en fait qu’une grille salariale… comme tout le monde ! C’est le genre de personne qui te convoque à 14h dans son bureau, tu arrives à 13h50 devant sa porte ouverte, elle te voit mais elle est au téléphone donc tu patientes. Elle raccroche à 14h05, elle te regarde, regarde sa montre et te dit, condescendante : vous êtes en retard. Tu t’installes quand même dans son bureau, tant bien que mal, en slalomant entre les piles de dossiers qui jonchent le sol, jusqu’à ta chaise. Voilà c’est ça Monique, l’image de la DRH. Je pense qu’il est utile de définir cet acronyme « DRH » : Direction des Ressources HUMAINES ». Lors de notre dernier entretien, avant mon embauche définitive, ils veulent donc éclaircir quelques points. Le rire nerveux, Monique commence : - Alors Marie-Aude, on ne vous cache pas que votre candidature nous intéresse fortement. Nous avons néanmoins quelques points à éclaircir par rapport à votre… à votre… hum… handicap. Oui alors voilà, je ne vais pas tourner autour du pot, comment vous réagiriez si vos collègues vous regardent, s’interrogent ou ont peur de vous ? - Pardon ? Bien, écoutez… nous sommes dans une entreprise où il y a 80 % de cadres, qui ont fait de grandes écoles, j’ose espérer qu’ils iront au-delà des apparences… - Ah aha hah, vous avez raison, Marie-Aude, vous avez raison ! Et si par hasard vous avez rendez-vous avec un journaliste et là, il vous voit et il a un mouvement de recul, comment vous réagissez ? - Euh… j’imagine que le journaliste est là pour avoir des informations, pas pour me séduire donc je ne comprends pas trop le sens de votre question ? Après trois entretiens chez Rézo et préalablement quatre entrevues avec le cabinet de recrutement spécialisé, je suis embauchée.
Mais ce n'est pas fini ! La collecte se poursuit jusqu'au 12 décembre ! Vous ne pouvez pas savoir à quel point cet engouement me touche, preuve que le message que je souhaite véhiculer via ce livre peut toucher le plus grand nombre et, je l'espère, libérer la parole de beaucoup de victimes. Ces 3000 euros vont me permettre de financer la mise en page, d'imprimer 500 livres, et d'intégrer quelques circuit de distribution. Pour que je puisse en imprimer plus pour inooooonnnder les librairies, la cagnotte continue ! Oui, ce livre sera un self-made-book ! Tout est entre mes mains, avec vous qui me suivez. Merci à toutes et tous, du fond du coeur. Mak
Voici un chapitre du livre, histoire de vous remercier de votre soutien ou de vous donner envie d'en lire plus ! Moi, handicapée ? Jamais ! … 2006 Je n’ai jamais voulu être reconnue Travailleur Handicapé. Née avec une maladie génétique rare, une dysplasie ectodermique m’ayant provoquée une atrophie rénale, je suis greffée à l’âge de 7 ans après six mois de dialyse. J’ai toujours été dans une sorte de déni de ma maladie, d’ailleurs je ne me considère pas comme malade, après tout, être greffée ce n’est pas la mer à boire… ça, c’est ce que je pensais jusqu’à aujourd’hui. Les stages d’études, les jobs d’été, je me suis toujours débrouillée toute seule pour les obtenir. Ma différence physique, car ma dysplasie ectodermique est caractéristique, se traduit par une rare pilosité, des cheveux blancs très fins et courts, en somme, j’ai la tête de quelqu’un en rémission de cancer. En stage, les collègues se posent des questions, s’inquiètent parfois. J’ai toujours pris le parti de les rassurer, je me suis toujours dit depuis le début de ma scolarité jusqu’à aujourd’hui que c’était à moi d’aller vers les autres, souvent avec humour, pour briser la glace, leur expliquer que ce que j’ai « n’est pas grave ». 2006. Lors de mon stage dans une chaîne de télévision, tout se passe bien et ma tutrice, Nath, me dit, en riant : - Tu sais ce qu’il m’a dit Serge, du pôle compta ? Que tu étais bien comme petite et il m’a demandé de quel institut tu venais ! - De quel institut ? Comment cela ? - Il pense que tu viens d’un institut pour personnes handicapées ! Évidemment je lui ai dit que tu n’étais pas handicapée… il est con. À l’époque, j’ai 22 ans et cela fait 15 ans que je suis greffée. La RQTH (Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé), je n’y pense même pas et je crois même que je n’en ai pas encore connaissance. J’ai galéré une fois entrée dans la vie active à cause des préjugés. Les stages, c’est certain, n’engagent pas l’entreprise à long terme, mais quand il s’agit de recruter pour produire, aller chercher le client, être performant, faire partie d’un collectif… c’est une autre histoire. La « différence » et la maladie font peur. J’avoue, c’est certainement un peu de ma faute… quand on a un physique atypique, il faut faire gaffe à son orientation professionnelle. Moi, comme une imbécile, j’ai choisi la com’, le métier où tu es l’image de ton entreprise !! À la sortie de mon école de publicité, de laquelle je suis sortie 3e, oui cher lecteur, j’ai voulu monter ma boîte, c’était un rêve. J’ai été chef d’entreprise pendant presque deux ans, seule à la barre, j’ai créé une agence de communication à Cherbourg, ma ville natale. Une très bonne école qui m’a permis de comprendre pourquoi les entreprises rencontrent des difficultés à embaucher : à peine tu as ton numéro de Siret que tu as des taxes qui te tombent dessus, RSI, URSSAF. Ça encourage n’est-ce pas ? ! Mon découragement est arrivé au bout d’un an et demi puis j’ai décidé de retrouver une activité salariée afin de vivre des nuits plus sereines…